Hôtel Lotte, Sogongdong
- Poète de la poissonnerie au coeur immense -
Entretiens par K. Yung, ônomad le 18 février
Chef coréen, Kim Do-Hyun à GAYA, par Pierre Gagnaire, 16 étoiles au Guide Michelin
Tout proche de l'arc-de-triomphe, l'intuition fulgurante et la recherche composent à parts égales le génial talent du Michelin 16 étoiles, Pierre Gagnaire. D'après mes trois décennies d’observation de la gastronomie parisienne ce chef a une façon très poétique d'harmoniser les aliments délicats, me rappelant les cartes de l'ancien chef 3 étoiles, Alain Sendrens au Lucas Carton (place de la Madeleine, précurseur de la nouvelle cuisine et mort en 2017). Et sa carte présente une cuisine très inventive à travers laquelle il met en avant la fidélité inestimable d'une équipe vouée à la haute cuisine française.
En observant l’endettement des autres chef-gestionnaires ambitieux (Hélène Darroze, Jean-François Piège), ce chef garde toute sa concentration à travers un long silence qui traduit mal ses craintes, malgré 16 étoiles cumulées et une chaîne qui a son aura dans le monde.
Pierre Gagnaire a transféré sa belle table marine à 300m, dans ce qui fut jadis une maison conçue par le designer-décorateur argentin Marcelo Joulia, dont les réalisations essaiment dans les tables de Paris (Virtus, Unico). En raison des perturbations dues au mouvement des « Gilets Jaune » et du déplacement du chef, notre rendez-vous est enfin pris le 18 février et tous nos dialogues ne tournent plus qu’autour de l'ambiance radicalement changée par l'épidémie.
Ônomad : Après, quelques visites au 6, rue Balzac des années 2000 et une autre à Londres, j'ai appelé le directeur qui venait d’arriver de la ville St. Etienne pour l’entendre disserter sur votre restaurant à Séoul. Quelle est l'impression des coréens sur la première haute-cuisine française ?
Pierre Gagnaire : C’est en 2009 qu’un établissement a ouvert à Séoul, à Lotte Hôtel Sogongdong, par le conglomérat Lotte Groupe, après celui de Londres, Tokyo, Hong Kong, Las Vegas. Les premières années d’ouverture, les Coréens étaient assez réticents. Ils n'appréciaient pas l'art culinaire, les goûts délicats. Récemment, ça a énormément change. A Tokyo aussi, l'enseigne est déplacée de Ginza vers l’hôtel Intercontinental.
Ô : L'emplacement de Pierre Gagnaire a remplacé le restaurant Schönbrunn, château de Vienne d'Autriche des années 1990. C'est l'ultime prestige en Corée. Approvisionner en aliments et en ingrédients pour la haute cuisine française est t-il rentable aux marchés locaux de Séoul ?
PG : La nouvelle demande de l'art de vivre français et de bien-être s’est phénomènalement accrue en Corée et la haute cuisine nécessite une main d'oeuvre précieuse, difficile de percevoir pour moi, un chef français... C’est plutôt le groupe Lotte de l'hôtellerie de prestige qui s'occupe des marchés coréens.
Avec le chef coréen Kim Do-Hyun aux fourneaux GAYA depuis un an, après 6 ans passés en sous-chef à la maison-mère Pierre Gagnaire, la cuisine est estampillée 100 % Gagnaire, avec des vins du sommelier Franck Lucas. Le cadre, fait de marbre blanc et noir ou de bois précieux d’acajou a le chic et l’élégance de l’Art déco.
Interrompues par le confinement brutal, nos conversations sur l'art culinaire ont pris fin, d’autant pus que la rue Balzac est en travaux jusqu'en septembre. Donc j'ai eu plus d’opportunités de parler avec le chef coréen actuel à GAYA, Kim Do-Hyun à de nombreuses reprises.
Gaya, le seul service à emporter parmi les 3 Gagnaires pendant le confinement, offre des menus sélectionnés aux 12 places en terrasse où le chef coréen suggère 2 parmi les 8 entrées/plats/desserts à partir de la deuxième phase de déconfinement, le 3 juin, avec le choix entre deux options de consommation : soit s'asseoir en terrasse ou plats à emporter mais sans livraison.
- Terrine de viandes blanches 23€ / Terrine de sole, velouté vert 25€ (8 Entrées)
- Fricassée de homard bleu aux girolles 45€ /Tranche de cochon fermier laquée,
oignonsdoux 18€ (8 Ensuites)
- Tarte aux pommes 12€ / Pana-cotta coquelicot, gelée de grenade, framboise 10€
(8 Desserts)
Et la carte ne manque guère d’imagination qui joue avec le pavé de bar de ligne poché à l'huile d'olive, le Sanea Tea, les oignons cébettes et les pommes de terre nouvelles ou encore les plats marins réalisés avec une conscience sensible.
Pierre Gagnaire, un berceau de jeune chef coréen pour la vocation de cuisinier d'expression française
Il n'est pas rare de voir de nouveaux jeunes Chefs ou Sous-Chefs coréens dans les maisons étoilées en France depuis des années. En 2017, le Passe-Temps de Lyon, connu pour sa cuisine française recherchée et métissée aux accents coréens dans un cadre moderne et épuré, est le premier étoilé grâce à son chef coréen, Lee Younghoon. Bien avant, un autre chef coréen, Baek, brillait déjà au Alain Ducasse de l'hôtel Meurice, à Paris 1er.
Leurs talents et leur passion font d’eux une main d'oeuvre douée pour des assiettes inventives, avec une belle touche de modernité et qui manquaient pas au palmarès gastronomique de l'Hexagone.Le Grand Chef Gagnaire apporta une esthétique gourmande et une cuisine de luxe, avec une poissonnerie qu’il concevait avec beaucoup de passion, et un tempérament affectueux à l’égard de son équipe.
Ô : Différences à Paris par rapport à l'expérience de travail en Corée?
Kim Do-Hyun : C'était l'un des chefs que mes collègues du monde entier recommandaient au moment de trouver un nouvel emploi. Et l'assiette de Gaya a l'air simple, mais elle a une variété de dévotion et de goût.
Ô : S’il fallait choisir la haute cuisine française pour une raison personnelle, quel serait votre souhait ?
KD : L'approche longue et systématique de la cuisine française envers les divers aliments et les techniques a beaucoup inspiré ma conception de la gastronomie.
Ô : Quels chefs coréens connaissez-vous ?
KD : Le Chef Park Jung-Cheol de la Maison Park et Yong Seok-Won, Chef au Bistrot d'à Côté, Flaubert à Paris et le Passe-Temps, de Lee Yong-hoon, à Lyon
Ô : Quelle est la différence entre l'art culinaire vu en Corée et en France?
KD :L'art culinaire en France semble avoir l'émotion d'apprécier le repas pour lui-même avec des gens qui ont du temps libre.
Ô : Qu'avez-vous gagné de vos efforts personnels et de votre pratique dans l'étude du vin?
KD : A l’aide de connaissances et de recherches, nous avons conçu et réalisé des dégustations à travers des conférences et des réunions sur le vin. Et j'ai pu harmoniser les plats et les vins vendus dans le restaurant d'une manière très caractéristique.
Ô : Les différences de la cuisine Gagnaire sont-elles un bon éclairage à GAYA …?
KD :Je voulais montrer la cuisine française tout en lui apportant une saveur profonde de la cuisine coréenne
Gaya : 6, rue de Saint-Simon Paris 7e
Tél. 01 45 48 35 74 Horaires : 12h-14h30, 19h-22h30
Fermeture hebdo. : Lundi, dimanche Métro(s) proche(s) : Rue du Bac
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