Par Lee Chul-ho
Transporté par le Samu (service médical d'urgence) à 5h du matin du nouvel an de 2019, à l'hôpital Kemlin-Bicêtre, j'avais, pour la première fois, l'impression que j'allais mourir.
C'était lors d'une exposition à New-Delhi, du 31 octobre au 2 novembre 2018, à l'hôtel Ashok, un vieil établissement de 5 étoiles appartenant au gouvernement. Le dernier matin, j'ai pris un tuk-tuk pour aller visiter un marché traditionnel, à quelques kilomètres de là. Rien de plus normal. Mais le lendemain, quand j'ai hélé un taxi pour aller l'aéroport, j'ai senti d'atroces douleurs abdominales, jamais ressenties auparavant, à tel point que j'ai désespérément fait arrêter le taxi et je me suis précipté vers un petit hôtel : en raison d'une déshydratation et d'une soif extrêmes, le litre d'eau que j'avais bu est parti immédiatement dans les selles !
Par la suite, je suis tombée dans un état où il m'était difficile de faire la distinction entre l'urine et les selles. Incapable de surmonter la douleur, j'avais du mal à trouver le sommeil, ne cessant pas les va-et-vient au petit coin.
Pendant le vol de retour à Paris, j'ai dû faire le tour de toutes les toilettes de l'avion, susciant la compassion du personnel de la Lufthansa. Arrivé à Paris, les douleurs d'estomac, les maux de tête et la diarrhée, se sont exacerbés à la maison, le tout accompagné d'une toux chronique et d'une perte d'appétit.
A partir de la veille de Noël, soit trois semaines après mon retour, j'allais passer mes journées étalé sur le lit, ne pouvant plus surmonter la douleur physique, ni mentale. Bien que je fusse condamné à un usage fréquent des sanitaires, je ne jugeais pas nécessaire d'aller à l'hôpital. N'avais-je pas une saine constitution physique?
Mais bientôt, les médicaments à visée prophylactque, Racécadotril anti-diarrhé que j'avais achetés n'avaient plus d'effet réel sur une distension abdominale devenue sévère. Je n'avais d'énergie que pour courir vers la salle de bain, toutes les heures.
Vers la fin de l'année, s'installa durablement dans mon esprit l'inquiétude de pouvoir mourir de ce mal atroce. À 5 heures du matin, à la St. Sylvestre de l'an 2019, je luttais contre une toux violent qui a fait précipiter ma femme dans la chambre où je m'étais isolé. Elle me suggéra de m'emmener à l'hôpital. Obstiné, je refusais de me résigner à cette éventualité que je trouvais disproportionnée au vu de simples symptômes d'une gastroentérite.
A l'aube, plus perspicace et jugeant inhabituelle l'intensité de ma toux, ma femme a appelé le Samu d'urgence et m'a forcé à prendre place dans l'ambulance. Un examen de santé protocolaire y fut réalisé par les urgentistes, qui établissent rapidement la nécessité impérieuse d'un examen plus approfondi. Malgré cela, je restais obstinément opposé à l'idée de me rendre à l'hôpital. Les ambulanciers ont dû mettre mon délire et mes incohérences verbales sur le compte d'une soirée trop festive à la St Sylvestre.
Aux urgences de l'hôpital, le diagnostic tomba comme un couperet: j'avais attrapé la typhoïde. Je fus admis en soins intensifs pendant cinq jours.
Sur mon lit d'hôpital, je me suis rendu compte plus tard qu'en mai 2018, 15 étudiants avaient été diagnostiqués affectés par la “Salmonella typhi”, après un voyage organisé en Inde. Ils avaient aussi séjourné à New-Delhi. Le ministère de la santé publique coréen avait dès lors stipulé qu'une vaccination préalable était obligatoire pour tous les voyageurs en partance pour l'Inde en 2018.
En remontant dans les souvenirs de mon séjour à New-Delhi, je me suis rappelé d'un verre de jus d'orange pressé par la main assez sale d'un marchand ambualnt du marché traditionnel de la ville, et que je soupçonne fortement d'être responsible de mon infection.
Une fois le corps infecté par la bactérie responsable de la typhoïde, celle-ci commence à agir après 2-3 semaines d'incubation en général, comme dans mon cas où la toux a persisté trois semaines après mon retour à Paris. L'état symptomatique de la typhoïde est caractérisé par l'apathie, la confusion et même la psychose. Les patchs de Peyer nécrotiques peuvent provoquer une perforation intestinale et une péritonite. Cette complication n'est pas toujours manifeste et peut être masquée par les corticostéroïdes. À ce stade, une toxémie accablante, une myocardite ou une hémorragie intestinale peuvent entraîner la mort.
Lors de ma sortie de l'hôpital, j'ai reçu des instructions préliminaires de mon docteur: si des symptômes similaires de contagion apparaissaient chez des membres de la famille, ils doivent immédiatement en informer les services de l'hôpital pour qu'ils puissent recevoir le traitement approprié.
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