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Photo du rédacteur.

Cuisine Coréenne Montreuil : Jadis & aujourd'hui par la cheffe, Lee Myung-jin


Youtube : madamelee montreuil

Soupe de Bouddha

Traditionnellement savourée en Automne, en fait et… en fête ;) elle est de toute saison. S'ouvre bien sûr par une porte de Sésame.

À l’instar des icônes, elle revêt une robe d'or et de rouges prompte à éveiller, rehausser, les palais endormis : ail, gingembre, soja, muscade, coriandre (la plante des temples bouddhistes), piments (pas si forts). Et dans cette rouille s'ébattent tantôt des poulpes – guérisseurs du foie, diminueurs de fatigue et de cholestérol – tantôt des chairs poissonnes –saumon, morue… – au milieu de radis coréens énergisants et autres poireaux. Le tout fond en bouche avec une lente douceur, et nous fait nous rappeler d'hier mais aussi de l'esprit asiatique de partage.


L'ancien restaurant 'Galerie, Salon des Artistes' appelé 'Madame Lee' à Montreuil


Car la soupe de Bouddha se fait surtout avec tout ce qu'on écarte d'ordinaire, et retire et rejette. Deux têtes de saumon (ou de morue) à un euro cinquante pièce suffisent à garnir une soupe pour quarante personnes… Ail, gingembre, soja, sésame, quarante : merveille des mille et un repas !


Si je tiens à m'appeler Madame Lee, ce n'est pas seulement par mariage. C'est parce que ma grand-mère qui m'a tout appris, elle aussi s'appelait Madame Lee. Cette recette je la tiens d'elle, la soupe de Bouddha était sa recette d'amour. Ma grand-mère, la nuit je lui apprenais à lire, à calculer, à savoir l'heure. Et le jour elle m'apprenait la cuisine.

– Grand-mère n'es-tu plus là ?


Ou bien est-elle toujours présente…


Ma soupe de Bouddha est mouillée de tristesse et de joie, de ce qui fait de nous des êtres qui voudraient être humains.


Hommage à Andrée Michel, rebelle féministe de Montreuil


https://www.onomad.club/post/hommage-a-andree-michel-101-ans-la-rebelle-f%C3%A9ministe


Le mois dernier j'ai perdu ma deuxième maman, mon Andrée qui tout un siècle pour tant de femmes a été un bodhisattva. Depuis, tous les dimanches je me rends à Montreuil et je prépare pour les amis ma soupe de Bouddha, soupe Andrée. La semaine dernière je l'ai faite avec des nouilles Oudon (japonaises) et quelques racines d'épinards plongées dans une soupe de moules sauvages ! En accompagnement, toujours avec des ingrédients dédaignés j'ai préparé des sushis aux œufs et d'autres aux anchois. Je fais de la Cucina povera comme il y eut de l'Arte povera.


Et bien sûr j'avais préparé Kimchi. De nos jours, on constate un engouement pour le chou, l'ail, la nourriture coréenne en général, tout ce qui renforce l'immunité, ces vaccins naturels. Dans les magasins d'alimentation bio, vous pouvez donc facilement vous procurer du chou et du piment rouge. La petite taille de celui-ci et ses feuilles douces sont tout à fait bonnes pour être consommées crues en 쌈장 samjang.


En dépit de la guerre et des temps, des dangers et des séparations, malgré l'urgence climatique dont on ne sait pas se soucier, le monde va sa course. Même s'il semble que de nouvelles choses se précipitent comme un tsunami, repoussant les choses anciennes et créant un nouvel univers humain ou plus trop humain, tout ne s'éloigne pas de la racine fondamentale, le plus originel revient.


Je voudrais explorer cela, qui entre modernité et éternel retour lie Baudelaire, Nietzche et Benjamin.

Et pour cela je dois simplement respirer, faire, prendre avec moi et apprendre.

Laver, couper, cuisiner.

Les légumes, les ingrédients pauvres, et les mots.


En Corée, on dit que tout apprentissage dans la vie peut débuter de l'âge de trois ans à la quatre-vingtième année. Andrée m'a montré sa patience, son courage, sa belle vieillesse et sa vie et mort éternelle.

Je tâche de vivre comme elle.

Je suis comme Andrée.


Soupe de Dragon

À l'automne en Corée, les champs sont verts de choux et aussi de radis que l'on récolte et dont on fera sécher les fanes pendant les mois d'hiver.


Puis un jour on mêlera ces fanes à des pâtes de soja, à de l'ail, des poireaux et/ou de la ciboulette, cela finement coupé, et parfois du piment au gré des gorges, le tout lié à de l'eau et du bouillon de saumon.


La cuisson résulte en une soupe d'écailles tendres, pareille à une chaude caresse ou une couverture tirée jusqu'au bas du menton : parfums de mer étale et saveurs végétales, sensation de repos autant que de réconfort. C'est que là les dragons ont replié leurs ailes afin de couver pour nous la puissance de la terre.



Lee Myung-jin à la cimetière de Montreuil en février



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