L'automne arrive à Manmulsang du mont Kumgang
Son U Young, République Populaire Démocratique de Corée.
Aquarelle et encre sur papier de riz, 128 x 60 cm, 2006.
Le peintre Son U-Young (1946-2009) est un artiste qui appartient à la catégorie des peintres du peuple de l'atelier Mansudae, la classe la plus élevée d’artistes au sein de la République populaire démocratique de Corée. Cette œuvre a été réalisée en 2006, en utilisant une technique traditionnelle exploitant toutes les possibilités de l'encre en matière de lignes et de surface.
La vue se situe au mont Kumgkang, à Manmulsang. Au premier plan, une composition marquée par des diagonales montre la roche qui donne un fort sentiment de densité et de concentration, et on aperçoit en arrière-plan des sommets qui émergent des nuages.
L’ensemble semble flotter dans une mer de nuages où les failles dessinent un S partageant les pitons rocheux du premier et second plan.
On devine l’artiste installé sur le sommet d’Onjeongryeong, qui domine les rochers Kiam qu’il a représenté. Il bénéficie d’une vue plongeante qui lui permet de regarder le rocher devant lui, et de distinguer une étrange falaise rocheuse derrière le Kiam, probablement les sommets Munsubong et Sujeongbong, où était situé le fameux temple Seokwangsa, important lieu sacré de la période Joseon, disparu depuis.
La composition des deux ensembles de montagnes au premier plan et en arrière-plan est rendue par l’utilisation de deux techniques graphiques différentes juxtaposées. Le rocher de Kiam au premier plan est exprimé avec une peinture de couleur appliquée sur le papier de riz épais laqué au collagène, traditionnellement extrait du poisson, et l’arrière-plan est rendu par des nuances de noir et blanc avec de l’encre diffus. Le collage de ces deux techniques en cohabitant donne un effet de perspective caractéristique de la peinture traditionnelle coréenne.
Pour exprimer la splendeur des roches qu’il a sous les yeux et les feuilles d’érable rouges qui annoncent l’automne, l’artiste utilise la technique « écran de l’Akyo », qui utilise un support de colle animale sur du papier de riz pour y appliquer et fixer la peinture et les couleurs, avec des couches successives, créant une impression de profondeur de la nature.
Cette technique d’expression de la nature avec des matériaux naturels exprime l’action du vent, de la pluie et du climat extrême qui sculpte la roche. Elle est ici employée au service de la démonstration de la fierté et de la force du peuple coréen.
Munsubong en arrière-plan utilise les propriété du papier coréen au contact duquel l’encre se répand, donnant la sensation de craquer et de monter dans le Yin et le Yang. C’est une technique qui ne cherche pas l’éclat des couleurs comme au premier plan, mais cherche à entrer au plus profond des émotions orientales.
Pour accéder à Onjeongryeong, le seul moyen était la ligne de chemin de fer Kumgangsan, construite pendant la période coloniale japonaise. Cette ligne étant fermée, l’artiste a pu s'y rendre à pied ou peindre cette scène en atelier ou par imitation. Néanmoins, il ne semble pas exister de modèle antérieur similaire, alors que son œuvre est par contre considérée comme un chef d’œuvre et fait désormais référence pour cette scène, comme le montre par exemple l’œuvre de l’artiste Hong En-Sam, réalisée en 2012.
Deux ans après avoir soumis un travail sur les étranges falaises rocheuses de Kiam en 2004 ou il utilisait la technique du Yin-Yang, cette œuvre peut être considérée comme le produit fini, la conclusion de l’artiste sur le sujet de Manmulsang au mont Kumgang. Son expression de la montagne démontre qu’il avait un problème à surmonter, comme le rocher représente les obstacles et les difficultés à surmonter pour le peuple coréen.
Le mont Kumgang est depuis longtemps une source d’inspiration artistique pour le peuple coréen, et l’artiste signe là un chef d’œuvre d’expression hyper réaliste basée sur des techniques traditionnelles en capturant avec audace les montagnes majestueuses aux prémices de l’automne.
* Mija Han, Coutances Art Center
Comentarios