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"Apatride Coréenne" à la recherche de 'Porte Dorée' d'Europe en 1919


Par K. Yung


Le mot grec «DIASPORA» désigne une population dispersée dont les origines proviennent d'une zone géographique plus petite: les diasporas juives, libanaises et irlandaises dispersées dans le monde et la nouvelle vague de vietnamo-chinois disséminés dans le monde occidental, à la recherche de sécurité physique ou de meilleures opportunités éducatives et économiques. La communauté de Wenzhou, de la province chinoise du Zhejiang, fournit les investisseurs les plus puissants au monde. Les communautés diasporiques coréennes sont estimées à 8 millions dans le monde, dont 2.5 millions aux Etats-Unis. Le vieux continent européen n'affiche qu'un début timide : env.150,000.



L'identité nationale est un sentiment commun d'appartenance à l'endroit où nous vivons. C'est aussi celui d'avoir un but commun. Toute société en bonne santé a besoin d'un sens communautaire, ce 'NOUS', sans lequel il ne saurait y avoir de sens partagé des obligations et des devoirs. Divisé en de nombreux petits pays, le continent européen avait mérité ces challenges perpetuels qui les ont incités à se concurrencer. Cette saine rivalité allait accélérer le développement des pays européens aux dernières trois décennies. Aujourd'hui, la crise migratoire a renforcé l'union européenne dans sa volonté de se consolider afin d'y répondre sereinement. Les divisions au sein des sociétés d'organisation tribale et religieuse empêchent l'émergence d'un sentiment d'identité commune, garant des structures de l'Etat et de la prospérité.


En 1997, pour sortir de la crise économique et des contraintes du FMI, le peuple coréen s'est lancé dans un mouvement de solidarité nationale pour collecter de l'or. En janvier 1998, sous l'égide de la «Korea Housing Bank» et de la «Korea Broadcasting System», des associations catholiques et chrétiennes, des moines et secrétaires de l’Ordre bouddhiste Chogye se sont associés à ce mouvement qui s'est donné comme objectif de sortir le pays de la crise économique. D’autres banques, des châines de télévision et plus de 40 groupements civils et religieux s'y sont associés. Les objets en or collectés (bijoux, pièces de monnaie, médailles d’or ...) étaient transformés en lingots destinés à contribuer au règlement de la dette nationale en dollars.


Identité Nationale de la Diaspora Coréenne 'NOUS'

Après avoir bénéficié d’un prêt de plus de 80 milliards de francs suisses du Fonds Monétaire International (FMI), la Corée du Sud devait mettre en place des réformes économiques draconiennes qui auront pour effet de freiner la croissance économique, d’augmenter les taxes et impôts et de limiter les dépenses.

A la mi-janvier, plus de 800 000 familles avaient déjà participé à la collecte. Environ 227 tonnes d'or ont été collectées grâce à ce mouvement, auquel ont participé environ 3,35 millions de personnes dans tout le pays. Cela représentait environ 2,13 milliards de dollars d'or. Le mouvement est devenu un exemple représentatif de ce 'NOUS' prêt au sacrifice volontaire du peuple face aux difficultés de la Nation.

L'édition initiale “100 ans d'histoire des Coréens en France” (dirigée par Li Jine-Mieung, Lee Sang-moo, Lee Seog-soo : voir pages 6-7 Ônomad n.janvier 2021) est sortie en 2019.

Du fait de la défaite de l'Empire coréen, et pour fuir l'oprression japonaise, de nombreux Coréens se sont fait passer pour des citoyens chinois, vivant ainsi en réfugiés. Retrouver leurs traces aujourd'hui n'est pas une tâche facile, mais c'est un devoir qui doit être poursuivi.

Qui sont ces Coréens? d’où viennent-ils? comment vivent-ils? comment s'est passée leur intégration dans la société européenne? C'est à ces questions et à d'autres qu'entreprend de répondre “100 ans d'histoire des Coréens en France”, une histoire communautaire de 475 pages (édition coréenne) qui couvre tous les aspects de l’évolution de la vie d'environ 15000 résidents de toutes les catégories sociales.


Motivée par l'importance de cette oeuvre collective, la Fédération européenne des Coréens vient de célébrer la sortie, en décembre 2020, de 3 volumes, en collaboration avec des Associations des Coréens de chaque pays: “100 ans d'histoire des Coréens en Europe” :

1er volume: Allemagne, U.K., France,

2ème volume: Grèce, Pays-Bas, Luxembourg, Belge, Suisse, Espagne, Ireland, Autriche, Italie,

3ème volume: Norvège, Danemark, Romanie, Bulgarie, Tchèque, Croatie, Turquie, Pologne, Finlande, Hongrie


"D'où venez-vous (de) et où allez-vous (à)"? La première question sur le passé est directement liée aux perspectives d'avenir, lesquelles sont proportionnelles au volume des connaissances sur le passé. Le classement des événements passés constitue la base du travail de définition de la direction de l'histoire future. Cho Kwang, président du Comité nationale de compilation d'histoire, affirme dans une préface que “Maintenant, les Coréens en Europe ont une histoire vieille de 100 ans. Et sur la base de cette mémoire historique, nous pensons prévoir encore 100 ans à venir”.


Trois livres ont été réalisé sous la direction de

Yoo Je-hun, 16e président de Fédération européenne des Coréens




Ce livre initiative a été réalisé sous la direction de LI Jine-mieung, historien, professeur émérite à l’Université Jean Moulin – Lyon III

En 1919,

35 travailleurs coréens s'installent à Suippes en France


En 1913, pour échapper à l'oppression de l'impérialisme japonais, des immigrants coréens des provinces chinoises de Mandchourie et de Gando sont arrivés à Murmansk, en Russie, en pleine première guerre mondiale. Les troupes britanniques, qui avaient pris le contrôle de la région en 1919, prévoyaient de rapatrier les 500 travailleurs coréens restants vers le Japon, à la fin du conflit.

En octobre 1919, les travailleurs coréens de Murmansk déposèrent une pétition auprès de la Délégation à Paris du Gouvernement provisoire de Corée, établi sur la concession française à Shanghai pour empêcher leur retour forcé. En conséquence, la Délégation coréenne à la conférence de la paix à Paris(Versailles) a envoyé Hwang Ki-hwan à Edinburgh pour secourir 200 coréens arrivés initialement en Angleterre. Hwang a négocié avec les autorités britanniques et françaises.

Hwang avait souligné aux Ministère britannique des Affaires étrangères et de la Défense que ces Coréens ont travaillé à Mumansk sous le commandement des forces britanniques. 35 Coréens ont ainsi réussi à immigrer en France. Ils étaient principalement affectés sur les chantiers de réparation des voies ferroviaires ou la construction de cimetières pour les victimes de la guerre. Hwang est informé que la première association des Coréens à Shippes a été créée le 19 novembre 1919, le jour des premiers arrivés. (extrait page 44 de l'édition coréenne '100 ans d'histoire des Coréens en France')


Partout en France, les bras manquaient pour édifier des infrastructures plus grandes et reconstruire un térritoire détruit par les guerres (4 000 communues dévastées ou endommagées en 1918). L'immigration de travail s'est donc imposée d'elle-même. Mais le pays a bénéficié aussi, durant la période 1920-1975, de l'afflux de réfugiés venus de plusieurs régions du monde : 58 000 réfugiés arméniens dans les années 1920. Suivront cinq autres vagues de réfugiés ou d'exilés durant le XXe siècle: les juifs d'Europe centrale et orientale, les Russes blancs fuyant la révolution bolchévique, les Espagnols ... (par Pierre Vermeren). La dernière vague de réfugiés est celle des “boat people”, qui ont fui les régimes communistes d'Indochine après le départ des Américains, en 1975.


En 2019

Le 1er novembre 2019 fut un événement historique pour la communauté coréenne en France. En effet, une cérémonie commémorative des 100 ans de l'arrivée des premiers Coréens à Suippes a eu lieu dans la ville, avec dévoilement d'un monument et une prestation de 70 membres de Chorale nationale coréenne pour féliciter les pionniers de Corée. Organisée conjointement par l'Association coréenne de France (Président Na Sang-won) et la Fédération européenne des Coréens (Président Yoo Jae-hun), cette cérémonie a été l'occasion de souligner le sacrifice et le courage de ces hommes qui avaient tout quitté pour l'inconnu. Après le dévoilement du monument, s'ensuivit une parade d'un kilomètre à travers la ville, accompagnée par l'”Union Musical Orchestral Band”. Brandissant des drapeaux, les membres de l'Association des Coréens de la Légion étrangère ouvraient la marche, fermée par environ 200 ressortissants coréens qui ont tenu à suivre le défilé.


Dans l’idée de faire émerger politiquement la communauté coréenne (inconnue et méconnue jusqu'à fin du XXe siècle) à laquelle j’appartiens, il s’agit avant tout de lui donner une visibilité, pour lutter contre l’image galvaudée de la communauté asiatique et pour que nous soyons aussi considérés comme des concitoyens ordinaires et non plus stigmatisés comme le «Chinois clandestin», vendeur de nems ou les camelots Bangladais de La Chapelle et du Sacré Coeur. Cette stigmatisation a déjà été portée, à certains moments, par d’autres communautés: juive, maghrébine et africaine. En ce qui nous concerne, nous sommes une communauté récente, les coréens cultivant, par le passé, cette philosophie qui consiste à vivre dans la discrétion, afin de ne pas “déranger”. L'afflux des Coréens en France et dans le monde a commencé dans les années 90, avec la nouvelle loi coréenne qui permet de voyager et d'aller étudier à l'étranger.

Au-delà du Mur de Berlin 30 ans Conflits Idéologiques, Sud et Nord

La Corée a été détruite par la guerre 1950-53, comme le Vietnam a été dévasté par l'armée américaine jusqu'en 1975. L'histoire du Vietnam est très similaire à celle de la péninsule coréenne. Paris abrite la plus ancienne communauté vietnamienne d'outre-mer dans le monde occidental. Aujourd'hui, la diaspora vietnamienne compte plus de 350.000 en France. L'immigration de ses membres a commencé bien avant la prise de Saïgon, par les communistes du Nord, en 1975.


Des dizaines de milliers de migrants vietnamiens vivaient déjà en France avant même le début de la guerre du Vietnam, dont seulement 20 000 pendant la seconde guerre mondiale. Ces immigrants vietnamiens d'avant-guerre qui avaient ouvertement soutenu les idéaux communistes différaient grandement de la nouvelle vague de réfugiés vietnamiens anticommunistes d'après-guerre, forcés de fuir leur patrie après 1975. En raison de cette dualité ironique entre pro et anticommuniste, nous n'avons pas encore de politiciens vietnamiens actifs en France, contrairement aux États-Unis.

Les Coréens ont également souffert de cette dualité idéologique, en Allemagne et en France, jusqu'à la fin du XXe siècle, d'où le silence des politiciens exilés coréens.

La Voix Coréenne en France et en Grande Bretagne.

Depuis 30 ans, être transparent, invisible était considéré comme le meilleur moyen d’intégration par nore communauté coréenne, respectant en celà le principe confucéen commun aux Asiatiques: à partir du moment où l’on ne parlait pas de nous, on pensait que l’on ne dirait pas de mal de nous ... Ce comportement typiquement d'Asie ou celui de respecter d'abord les autres à la japonaise n’a plus cours aujourd'hui. Certes il a été d'une grande utilité les trois premières décennies pour le minoritaire, mais maintenant, soit nous restons cachés et nous serons les oubliés de demain, soit nous nous réveillons pour parler de nous avec les concitoyens.

Contrairement aux Chinois (Hongkongais), Indiens et Pakistanais en Angleterre, les communautés asiatiques d'Europe continentale souffrent d’une image négative. Elles subissent les conséquences directes des violences du dictateur nord-coréen, et celles des événements survenus en Chine. Ce n'est qu'à l'aube du XXIème siècle que les membres de la communauté coréenne, minoritaires et submergés par les autres communautés asiatiques, ont commencé à souligner leurs grandes différences (linguistiques, culturelles ...) avec les Japonais, les Chinois, les Viétnamiens, les Laotiens, les Indiens ...

Les nouveaux Coréens venus directement de Corée du Sud, du Japon, d'Amérique ou d'autres pays, ainsi que les plus de 800 Nord-Coréens de New Malden, en Angleterre, sont les meilleurs ambassadeurs en Europe.


Les deux anciens ministres français, Fleur Pellerin et Jean-Vincent Placé ainsi que le sénateur Joachim Son-Forget ont tous été des bébés coréens adoptés. Ils sont donc Français et n'ont pas à l'esprit l'identité nationale coréenne. Le ministre actuel de Macron, Cédric O et sa soeur Delphine O, ont des parents franco-coréens.

En Angleterre, Ha Jae-sung, président de l'association coréenne UK, est élu au conseil municipal de Kingston, près de New Malden, ainsi que Bora Kwon, en 2018, à Ravenscourt park, Hammersmith.


Après 30 ans d'immigration et 100 ans d'histoire avec l'Europe, l'état actuel de la communauté coréenne montre, depuis une vingtaine d'années, un essor du phénomène 'K'. Dans le contexte de la mondialisation, les Coréens, résidents et non-résidents, ont un statut local conditionnel fondé sur des droits et des devoirs, et gardent majoritairement à la fois leur identité nationale d'origine et leur identité nationale de coeur. Ils échangent volontiers avec leurs concitoyens locaux par la propagation de la culture 'Hallyu' et de la langue coréenne. C'est un signe de la nouvelle manière de façonner un mouvement pour une communauté internationale 'jus nexi'.
























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